Louise Oligny fut d’abord photographe, et cela se ressent dans son écriture. Il y a quelque chose de précis, de dense, d’immédiatement juste et très visuel dans « ADN féminin », son deuxième roman paru dans la collection Black Lab des Editions Hachette. Née au Québec, établie en France depuis 1989, l’auteure mène également, depuis plusieurs années, en collaboration avec l’autrice/dessinatrice Clémentine du Pontavice, des ateliers d’estime de soi auprès de victimes de violences à la Maison des femmes de Saint-Denis. Un lieu – rebaptisé Château des femmes – et une thématique que l’on retrouve très logiquement dans ce polar. Mais bien évidemment, il s’agit d’une parfaite fiction où, précise toutefois l’auteure, « malheureusement, des femmes se reconnaîtront ». Prouesse assez rare, voilà donc un hommage fin, sobre, émouvant à toutes les victimes humiliées et blessées qui se relèvent et retrouvent leur liberté, car « rien n’est plus majestueux qu’une femme qui s’envole ».
En bon polar, « ADN féminin » commence par un meurtre. Celui d’un mari violent retrouvé égorgé à l’issue d’un spectacle donné par les participantes d’un atelier de danse du Château des femmes. Or l’ex-épouse du mort, Sophia Alami, faisait partie des interprètes. Elle est immédiatement suspectée, puis recherchée tout à la fois par la police et par les proches du défunt, une des plus puissantes familles mafieuses de l’endroit mais qui a toujours su déjouer la vigilance de la police.
Une enquêtrice pas très orthodoxe…
Deux femmes vont alors entrer en scène et, indépendamment, mener l’enquête. D’un côté, Diane Choinière, une photographe un brin déjantée qui travaille au Château des femmes et vit avec un inspecteur de police, Patrick, qui l’a autrefois tirée d’un mauvais pas. De l’autre, la capitaine Coralie Gignac, une ex-collègue de Patrick, qui vit rongée par le remords de n’avoir pas su empêcher la mort d’une femme maltraitée par son conjoint. La générosité bienveillante et maladroite de l’une se heurte à l’apparente rigidité professionnelle de la seconde. Et les choses se corsent quand deux morts – deux assassinats semble-t-il – s’ajoutent à la première.
Comme souvent dans les polars écrits au féminin, Louise Oligny s’octroie la liberté de ne pas se prendre trop au sérieux, même si le thème de la violence et de la maltraitance, lui, reste des plus dramatiques. L’écrivaine place ainsi son héroïne favorite – la photographe Diane – dans les situations les plus incongrues, l’affuble d’une gênante infection urinaire, d’un goût excentrique pour les fringues voyantes et d’une jalousie dévorante face à Coralie. Et pour couronner le tout, son conjoint toujours généreux lui fait cadeau d’un malinois passablement amoché. Un improbable chien policier réformé avec certes une médaille d’honneur, mais un œil, un bout de queue et un morceau d’oreille en moins, un « combattant de la lutte contre le grand banditisme » baptisé…. Rintintin. Autant dire pas très glamour ! L’animal a de plus la fâcheuse habitude de se figer dès qu’il se trouve à proximité d’une substance illicite. Gênant quand on rend visite à des amis, mais fort utile quand on s’attaque à des trafiquants sans scrupules.
« ADN féminin ». De Louise Oligny. Hachette Livre, Black Lab, 286 p.