Polars, Polis et Cie | Le blog de Mireille Descombes

Le nom de l’Américain Horace McCoy ne vous dit rien? Son œuvre, pourtant, brille au firmament des classiques du polar. « On achève bien les chevaux », c’est lui, « Un linceul n’a pas de poches », lui aussi. Publié en 1937 en… Angleterre, adapté au cinéma par Jean-Pierre Mocky en 1974, ce roman traite de la liberté de la presse, des brimades des politiques et de la pression exercée par la publicité sur les journalistes. Il n’a pas pris une ride. Aujourd’hui comme hier, oser dire la vérité peut mettre en péril un emploi, ou même une vie.

Grâce à l’astucieuse politique de réédition de la Série noire qui nous a déjà valu quelques savoureuses pépites (https://polarspolisetcie.com/relire-raymond-chandler-vite/, https://polarspolisetcie.com/le-tueur-fou-du-sentier/), « Un linceul n’a pas de poches » nous revient dans une traduction révisée par Michael Belano. La préface de Benoît Tadié rappelle que ce livre a connu plusieurs titres provisoires, qu’il a d’abord été refusé par les éditeurs américains qui ne l’ont publié qu’en 1948, dans une version édulcorée, et qu’il comporte une importante part autobiographique. Il est vrai qu’avec une vie aussi singulière et mouvementée, il y avait de quoi faire.

Un style vif et concis

Né en 1897 à Pegram (Tennessee) dans une famille pauvre, Horace McCoy commence à travailler à 12 ans comme vendeur de journaux. En 1917, il s’engage dans l’armée, devient observateur aérien et débarque en France en 1918. Il y sera décoré de la Croix de Guerre pour héroïsme. Démobilisé, il devient journaliste sportif à Dallas, commence à écrire, publie ses premières nouvelles, mais perd son emploi lors de la Grande Dépression de 1929. On le retrouve ensuite à Hollywood où il tient quelques petits rôles avant de se consacrer à l’écriture de scénarios. En littérature, on compare souvent son style vif et concis à ceux de Steinbeck et Hemingway, mais son regard sans concession sur la société américaine dérange. En 1955, à 58 ans, Horace McCoy meurt d’une crise cardiaque à Beverly Hills, dans l’indifférence générale.

Des émules du Ku Klux Klan

Toutes ces expériences, transfigurées, ressurgissent dans « Un linceul n’a pas de poches ». Colton, où se déroule l’intrigue, est en outre clairement inspirée par Dallas, où l’écrivain a vécu entre 1919 et 1930. Mike Dolan, le personnage principal du roman, est un journaliste épris de justice et de vérité. Il démissionne avec fracas du journal qui l’emploie quand le rédacteur en chef refuse, une fois de plus, un article dénonçant la corruption dans le monde du base-ball. Avec deux amis, dont la piquante et indomptable Myra, ce Don Quichotte sans peur mais pas sans failles crée alors son propre magazine, le Cosmopolite. Déjouant les attaques de ses ennemis et les chausse-trappes d’une vie amoureuse agitée, il multiplie les révélations et va jusqu’à s’attaquer aux Croisés, des fanatiques qui s’inspirent des pratiques et de l’idéologie du Ku Klux Klan. Une société secrète à la tête de laquelle siègent plusieurs notables de la ville. Ces derniers seront-ils prêts à tout pour le faire taire? La victoire est fragile et vulnérable quand ses ailes sont en papier.

 

« Un linceul n’a pas de poches ». De Horace McCoy. Traduction de l’anglais de Sabine Berritz et Marcel Duhamel, révisée par Michael Belano. Préface inédite de Benoît Tadié. Gallimard, Série noire, 290 p.

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Ce livre n’aurait pas dû voir le jour. Louise Penny nous le confie à la fin d' »Au royaume des aveugles ». Après le décès de son mari qui lui avait inspiré le personnage du policier québécois Armand Gamache, l' »Agatha Christie canadienne », comme l’a surnommée la presse, se sentait incapable de continuer la série. Et puis cette nouvelle enquête – il faudrait plutôt dire ces nouvelles enquêtes car comme toujours ce roman est largement polyphonique – a vu le jour presque indépendamment de sa volonté, un peu par miracle. Et sans tristesse. « Non pas par obligation, mais dans la joie », précise-t-elle.

« Au royaume des aveugles », ce sont donc deux enquêtes parallèles, deux affaires indépendantes avec pour ancrage commun Armand Gamache et son équipe. Nous sommes en plein l’hiver. Le directeur général de la Sûreté du Québec, ou ex-directeur selon les points de vue, a été suspendu à la suite d’une opération controversée en lien avec un trafic d’opioïdes. Il s’agissait d’empêcher à tout prix la diffusion du carfentanil, cent fois plus intense que le fentanyl, « une drogue si puissante, si dangereuse qu’elle finissait par tuer presque tous ceux qui en prenaient » (https://polarspolisetcie.com/le-noir-visiteur-du-soir-dhalloween/).

L’intervention policière a réussi, la bande criminelle a été neutralisée, mais une partie de la dangereuse substance est restée dans la nature. Tombée dans de mauvaises mains, elle pourrait ressurgir d’un jour à l’autre et faire d’immenses dégâts. Pour la retrouver, et ainsi laver sa « faute » envers la société, Gamache es prêt à tout, même à tromper ses pairs. L’occasion d’une plongée cauchemardesque dans le quartier des toxicomanes, prostitué(e)s et autres déshérités de Montréal.

Un mystérieux testament

La deuxième affaire semble a priori plus légère. Elle tourne autour d’un étrange courrier reçu par Gamache, une lettre qui lui donne rendez-vous dans une maison abandonnée. Intrigué, il se rend sur place et, très surpris, y retrouve Myrna, psychologue à la retraite, une amie vivant comme lui dans le petit village (fictif) de Three Pines. S’ajoute au duo une troisième larron parfaitement inconnu des deux autres. Les trois « élus » apprennent alors du notaire qui les a réunis qu’ils ont été désignés comme exécuteurs testamentaires par Bertha Baumgartner, une femme de ménage qui se faisait appeler la Baronne. Un canular? Pas vraiment, d’autant que peu après l’un des trois héritiers de la Baronne, l’aîné, est retrouvé assassiné dans la maison effondrée. Délicate mais menée de main de maître, l’enquête révélera que, contrairement aux préjugés, la beauté peut parfois faire bon ménage avec l’honnêteté et la bonté.

Comme d’habitude, Louis Penny nous tient en haleine de bout en bout, tout en nous régalant de petits plats du cru, ragoût de bœuf et croustade aux pommes chaude, accompagnée de crème épaisse. Elle nous offre quelques conseils pour résister à la violence de l’hiver canadien – moins 35 degrés –  et pointe la regrettable habitude des Québécois de perdre leurs gants, leurs mitaines et même leurs couvre-chefs en sortant de leur voiture. « Posés sur leurs genoux durant le trajet, ces articles oubliés finissaient dans la neige. Au printemps, le sol était jonché de crottes de chien et de vers de terre. Mais aussi de bonnets, de mitaines et de gants détrempés. »

 

« Au royaume des aveugles ». De Louise Penny. Traduit de l’anglais par Lori Saint-Martin et Paul Gagné. Actes Sud, Actes noirs, 444 p.

Ce livre n’aurait pas dû voir le jour. Louise Penny nous le confie à la fin d’ »Au royaume des aveugles ». Après le décès de son mari qui lui avait inspiré le personnage du policier québécois Armand Gamache, l’ »Agatha Christie canadienne », comme l’a surnommée la presse, se sentait incapable de continuer la série. Et puis cette […]

Un écrivain polyglotte? Amara Lakhous préfère le terme de « polygame linguistique ». Fasciné « par les gens qui vivent sur les frontières », par ceux qui se refusent à toute identité contraignante, ce créateur errant a choisi d’appliquer ces principes à sa propre vie. Né en 1970 à Alger dans une famille kabyle, il y a étudié la philosophie et travaillé comme journaliste avant de s’installer, au milieu des années 1990 en Italie. Où il a poursuivi sa formation, en anthropologie cette fois, et écrit plusieurs romans, en italien. Avant de repartir, et de s’établir aux Etats-Unis où il enseigne à l’université de Yale. Juste retour des choses, Amara Lakhous vient de publier chez son éditeur français Actes Sud un nouveau roman… traduit de l’arabe, « La Fertilité du mal ». Un polar qui se propose de revisiter, de façon vivante et passionnante, l’histoire algérienne depuis les années 1950, soit depuis la tristement fameuse guerre d’Algérie, dite aussi guerre d’indépendance.

Le récit commence le 5 juillet 2018 à Oran. Le jour de la fête de l’indépendance précisément. Miloud Sabri, 80 ans et une énergie intacte, s’apprête à s’offrir une jeune vierge dans sa luxueuse garçonnière. Le détail est sordide, mais révèle bien le caractère glauque et sans scrupule de cet ancien combattant du FNL, membre des services de renseignements et gangster aux multiples casquettes.

La rencontre ne se passe pas comme prévu. Miloud Sabri est retrouvé égorgé, le nez tranché posé sur la poitrine, un châtiment d’ordinaire réservé aux traîtres. Dans les hautes sphères du pouvoir, on s’inquiète et s’agite. Sommé de quitter sans délai les doux bras de sa maîtresse, le colonel Karim Soltani va devoir se démener pour dégager la vérité derrière le mythe, et réussir à ternir l’aura et briser la réputation de héros que s’est forgée, en écrasant ceux qu’il a trouvé sur sa route, cet homme que l’on surnommait « la Huppe ». Rapidement deux autres cadavres s’ajoutent au premier. Notre enquêteur va devoir redoubler de finesse et de vigilance pour découvrir, en moins de 24 heures, l’horreur dissimulée derrière des alliances et des amitiés qui parfois remontent à l’enfance.

Heureusement, précise l’auteur, « la lumière magique d’Oran, née de la mer et du soleil, lui mit un peu de baume au cœur. » Cette ville si belle accompagnera également le lecteur dans sa (re)découverte des différents épisodes d’une lutte pour la liberté constamment mise en péril par le totalitarisme et la soif de pouvoir de quelques-uns. Jusqu’à nos jours.

 

« La Fertilité du mal ». D’Amara Lakhous. Traduit de l’arabe par Lotfi Nia. Actes Sud, Actes noirs, 284 p.

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Deon Meyer a construit son nouveau polar « LEO » comme une symphonie. Avec un premier mouvement rapide, un long mouvement lent, des accelerandos, des solos magnifiques et un final prestissimo qui nous laisse ébahis. Du grand art. Et que les fans de l’écrivain sud-africain soient rassurés: ses deux policiers, les sympathiques lieutenants Benny Griessel et Vaughn Cupido, sont une fois encore au rendez-vous. Pour les lecteurs un brin fleur bleue, ajoutons que « LEO » s’articule et se rythme autour d’un mariage annoncé – pour le 12 juin, celui de Benny et de sa chère Alexa, une femme aussi sensible et belle que douée – sauf en cuisine. Une ancienne alcoolique, comme lui.

Dans ce roman, comme souvent chez l’écrivain sud-africain, la fiction se nourrit largement du réel. En l’occurrence, de la tristement fameuse « captation de l’Etat », une corruption systémique qui, sous la présidence du président Jacob Zuma (2009-2018) et avec la complicité des tout-puissants frères Gupta, a mis l’Afrique du Sud à genoux et ruiné bien des espoirs. Bien entendu, l’écrivain s’autorise aussi des libertés. Il a notamment changé les noms des principaux auteurs de ce pillage organisé, qui n’en restent pas moins aisément identifiables.

« LEO » se déroule entre deux opérations coup de poing mises sur pied par un commando super-entraîné intégrant des anciens membres de la brigade des forces spéciales sud-africaines (Recces). Destiné à s’approprier une partie des dollars volés par l’ancien président, la première tentative échoue toutefois, et se solde par des morts. Quelques mois plus tard, rebelote avec cette fois-ci dans le viseur une cargaison d’or clandestinement transportée par camion pour être acheminée ensuite par bateau vers la Russie. Cette deuxième attaque elle aussi capote. Le lecteur, qui sait tout ou presque, n’en sera pas surpris.

Crime, musique et cuisine

L’enquête de nos policiers s’inscrit en marge de ces deux événements dont ils ignorent quasiment tout jusqu’au bout. Ils cherchent, eux, les coupables de deux meurtres particulièrement barbares. Deux hommes retrouvés étouffés par de la mousse expansive. Un signe? Un avertissement? Ils pataugent. Le lecteur, qui très tôt possède une bonne partie des clés, se demande comment diable ils vont parvenir à découvrir le pot aux roses en travaillant au sein d’une police elle-même largement corrompue et dont les hauts gradés font tout pour les égarer. Un double suspense accompagné d’une agréable bande son, la musique étant l’une des passions de Benny Griessel, et de l’auteur.

On connaissait aussi déjà l’amour de Deon Meyer pour la France et le rugby. On découvre qu’il affectionne également l’Italie où se réfugie, après la première attaque, la seule femme du commando, Christina Jaeger, alias Chrissie. Une parenthèse ensoleillée et paisible qui est l’occasion de déguster une torta della nonna au célèbre Caffè Greco de Rome avant de bénéficier d’une leçon de cuisine offerte par un expert du pesce crudo et de la carbonara faite, comme il se doit, avec de la joue de porc séchée, le célèbre et inégalé guanciale.

 

« LEO ». De Deon Meyer. Traduit de l’afrikaans par Georges Lory. Gallimard, Série noire, 620 p.

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Est-il encore nécessaire de présenter Michael Connelly et son enquêteur fétiche Harry Bosch? Prenons le risque, voici un bref récapitulatif pour ceux qui prendraient le train en marche. Et que ses fans de toujours nous pardonnent !

Côté stylo, ou plutôt clavier, on trouve l’Américain Michael Connelly, 68 ans. Journaliste de formation et chroniqueur judiciaire de talent, il se lance en 1992 dans l’écriture romanesque avec « Les Egouts de Los Angeles ». Depuis, avec plus de 85 millions d’exemplaires de ses livres vendus, et traduits en 45 langues, son succès ne s’est pas démenti.

Côté personnage, voici Harry Bosch. De son vrai nom Hieronymus Bosch – oui comme le peintre flamand, il est le fils d’une prostituée assassinée alors qu’il est encore enfant. Après avoir participé à la guerre du Vietnam, cet homme intègre et tourmenté rejoint le LAPD (Los Angeles Police Department) dont il devient un enquêteur phare. Et bien que désormais retraité, il se retrouve tout naturellement au rendez-vous du dernier polar de Michael Connelly, « Sans l’ombre d’un doute ».  Un livre prenant et fort habilement construit qui s’inscrit dans la ligne de ses romans « procéduraux » plus spécifiquement consacrés au système judiciaire américain. Et comme toujours, la ville de Los Angeles fait figure de quasi-personnage et de décor.

Dans « Sans l’ombre d’un doute », Harry Bosch partage toutefois la vedette avec l’avocat Mickey Haller, son demi-frère aussi baptisé l’« avocat à la Lincoln », un autre personnage récurrent de la galaxie Connelly. Détail attristant, le lecteur apprend dans la foulée que notre ancien policier est gravement malade, qu’il souffre d’un cancer, une leucémie lymphoïde chronique. Et que c’est pour qu’il puisse bénéficier d’une assurance-santé privée lui permettant de suivre un traitement expérimental à UCLA (University of California) que son demi-frère l’a engagé comme collaborateur et chauffeur de sa fameuse Lincoln.

Une affaire trop vite enterrée

Voilà pour le contexte, assez complexe. Venons-en aux faits ! Après avoir fait libérer un homme condamné à la perpétuité pour un meurtre qu’il n’avait jamais commis, l’avocat Mickey Haller est inondé de demandes de détenus clamant leur innocence. Il charge Harry Bosch d’y jeter un œil et d’y faire un tri. L’une de ces missives retient leur attention. Elle émane d’une jeune femme, Lucinda Sanz, incarcérée pour avoir prétendument abattu sur son ex-mari après une dispute. L’homme était un policier, adjoint du shérif. La procédure a été bâclée. L’accusée a toujours clamé son innocence, mais acculée par des preuves apparemment trafiquées, elle a fini par accepter un deal et plaider « non contestation des charges » – nolo contendere. Elle n’avait dès lors plus à reconnaître avoir tué son ex-conjoint devant un tribunal.

Quelqu’un, visiblement, avait intérêt à ce que l’affaire soit enterrée rapidement ? Mais qui ? La police ? Et comment le prouver ? Tandis que Harry Bosch part sur le terrain à la recherche du véritable assassin, Mickey Haller affute sa stratégie et ses arguments oratoires. L’occasion pour le lecteur de s’initier aux particularités du droit américain puisqu’une partie non négligeable de « l’affaire Lucinda Sanz contre Etat de la Californie » se passe au tribunal.

Le procès est épique, avec des chausse-trapes, des rebondissements tragiques et des révélations pas piquées des vers. Pour rendre de façon vivante cette frénésie et le va-et- vient du récit entre les deux principaux protagonistes, Michael Connelly a choisi de dédoubler les points de vue. Avec une grande habileté, et presque sans que l’on ne s’en aperçoive, il mêle des parties écrites à la première personne, et qui donnent la parole à Mickey Haller, avec d’autres rédigées à la troisième personne qui suivent les recherches et scrutent les pensées de Harry Bosch. Une manière pour l’écrivain de faire corps avec son personnage malade tout en respectant son intimité et l’incertitude pesant sur son avenir ? Un constat s’impose en tout cas : si les deux compères, comme on s’en doute, l’emportent, on ignore en revanche ce qui attend Harry Bosch, en apparente rémission. Sera-t-il au rendez-vous du prochain polar de Michael Connelly ? Seul l’écrivain le sait, et encore…

 

« Sans l’ombre d’un doute ». De Michael Connelly. Traduit de l’anglais par Robert Pépin. Calmann-Lévy noir, 444 p.

Est-il encore nécessaire de présenter Michael Connelly et son enquêteur fétiche Harry Bosch? Prenons le risque, voici un bref récapitulatif pour ceux qui prendraient le train en marche. Et que ses fans de toujours nous pardonnent ! Côté stylo, ou plutôt clavier, on trouve l’Américain Michael Connelly, 68 ans. Journaliste de formation et chroniqueur judiciaire de talent, […]

Méfiez-vous des couples trop parfaits, surtout s’ils sortent de l’imagination d’une femme ! L’Américaine Leslie Wolfe nous le rappelle avec malice dans  «A cœurs ouverts », son premier roman traduit en français. Tandis qu’Anne Wiley, une brillante chirurgienne cardiaque, opère des patients en détresse, son époux Derreck, le futur maire de Chicago, prend du bon temps dans les hôtels les plus chics avec sa maîtresse, Paula Fuselier, surnommée la Vipère, une ambitieuse avocate au bureau du procureur d’Etat. Une banale tromperie ? Les choses auraient pu effectivement en rester là si un grain de sable n’était venu griffer le glaçage parfait des apparences.

Ce grain de sable, c’est une opération qui tourne mal et à laquelle le lecteur assiste « en direct », l’auteur s’étant minutieusement renseignée auprès d’une spécialiste. Alors que tout semble normal, le cœur d’un patient – arrêté le temps de l’intervention – refuse de repartir. Anne Wiley entame la réanimation puis, après une vingtaine de minutes, éprouve soudain le besoin de passer de l’autre côté du champ opératoire pour voir le visage du malade. Un choc ! Elle connaît cet homme qui, lors des consultations, se dissimulait derrière une barbe épaisse et une casquette. Ses traits, et notamment sa tache de naissance sur le front, lui rappellent les pires souvenirs. Elle abandonne la réanimation et notifie le décès. Le premier de toute sa carrière. Une épreuve difficile à surmonter.

Les nuages noirs dès lors s’amoncellent dans le ciel bleu de sa vie. Aux affreux événements liés à cet homme s’ajoutent l’animosité d’un collègue machiste et odieux qu’elle soupçonne du pire, et surtout l’arrivée impromptue, dans son bureau, de Paula Fuselier – la maîtresse de son mari – bien résolue à profiter de sa « faiblesse » pour détruire sa rivale. Le lecteur commence toutefois à se douter que la jalousie amoureuse n’est pas seule à motiver cette haine dévorante. De son côté, notre vaillante chirurgienne continue à chercher pourquoi le cœur de son patient n’est pas reparti. Et ce qu’elle va découvrir, on le devine, ne va pas lui plaire.

 

« A cœurs ouverts ». De Leslie Wolfe. Traduit de l’anglais par Manon Malais. Gallimard, Collection Série noire, 296 p.

Méfiez-vous des couples trop parfaits, surtout s’ils sortent de l’imagination d’une femme ! L’Américaine Leslie Wolfe nous le rappelle avec malice dans  «A cœurs ouverts », son premier roman traduit en français. Tandis qu’Anne Wiley, une brillante chirurgienne cardiaque, opère des patients en détresse, son époux Derreck, le futur maire de Chicago, prend du bon temps dans […]

A propos de ce blog

Scènes et mises en scène: le roman policier, l’architecture et la ville, le théâtre. Passionnée de roman policier, Mireille Descombes est journaliste culturelle indépendante, critique d’art, d’architecture et de théâtre.

Photo: Lara Schütz

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