Polars, Polis et Cie | Le blog de Mireille Descombes

Dans la vie quotidienne, l’élégante Zofia Turbotyńska n’est ni franchement sympathique ni particulièrement attachante. Chez elle, tout n’est que devoir, convenances, habitudes et soumission. Nous sommes à Cracovie à la fin du XIXe siècle, tout de même. Mais quand cette honorable bourgeoise croise l’odeur du sang et le parfum du crime, elle se métamorphose en un fin limier que plus rien ni personne ne parvient à arrêter. Ignorant les tâches domestiques, bafouant les conventions sociales, la digne épouse du professeur d’université Ignacy Turbotyński s’immisce avec tact mais opiniâtreté dans l’intimité de ses concitoyens pour y démasquer scandales, mensonges et non-dit. Et là, on l’adore !

Née de l’humour et de l’imagination fort bien documentée de deux Polonais  – Jacek Dehnel et Piotr Tarczynski – réunis sous le pseudonyme de Maryla Szymiczkowa, Zofia Turbotyńska revient en fanfare dans l’actualité littéraire avec « Séance à la Maison Egyptienne ». Cette troisième enquête aux multiples rebondissements démarre à la suite d’une soirée particulièrement faste à la toute fin de l’année 1898. Afin de célébrer dignement une éclipse totale de lune, la bonne société de Cracovie se réunit à la Maison Egyptienne, chez un médecin renommé, pour assister à une séance de spiritisme. Hélas, au moment crucial, l’hôte s’écroule pris de convulsions. Quand la lumière revient, il est trop tard : Władysław Beringer gît, mourant, sur le sol. Un confrère présent sur les lieux aussitôt constate : « C’est un empoisonnement à la strychnine. On ne peut rien y faire.»

Assister en direct à un crime ? Zofia Turbotyńska ne pouvait rêver plus excitant. Les circonstances lui sont en outre favorables : un vingt-huit décembre, la machine judiciaire tourne au ralenti. Afin d’éviter qu’un scandale inutile n’éclabousse les participants, elle convainc donc l’assemblée de ne pas appeler la police mais de s’en remettre au juge d’instruction Klossowitz avec lequel elle a déjà collaboré. Et compte bien collaborer sur cette affaire également.

Une bavaroise au laudanum

Notre gente dame démarre alors sur les chapeaux de roues. Elle démasque les infidélités des uns, les traîtrises des autres et les faiblesses de chacun. En passant, afin de pouvoir agir en toute tranquillité et éviter les questions inutiles, elle n’hésite pas à régaler son digne époux d’« une bavaroise au lait légèrement assaisonnée du laudanum de l’armoire à pharmacie ». Résultat, le brave homme dormira sans broncher ni se réveiller de vingt et une heure à treize heures ! Et quand il s’en étonne, sa femme le rassure : « C’est à cause de la viande.(…) Du rôti arrosé d’un bourgogne, ça te donne toujours envie de dormir ».

Car oui, j’oubliais, Ignacy Turbotyński est un fin gourmet, et un gourmet comblé car le couple possède une cuisinière hors pair. Cela nous vaut quelques savoureuses descriptions de plats copieux, et sans doute goûteux, dont ce « bœuf à la Godard » décoré de crêtes de coq évoquant la couronne des rois et perforées de trous ronds « remplis de truffe, de langue fumée et de cornichons ». Quant au prologue, lui aussi gastronomique et en outre teinté d’un redoutable humour noir, nous vous le laissons découvrir. Un régal !

 

« Séance à la Maison Egyptienne ». De Maryla Szymiszkowa. Traduit du polonais par Cécile Bocianowski. Agullo, 308 p.

Dans la vie quotidienne, l’élégante Zofia Turbotyńska n’est ni franchement sympathique ni particulièrement attachante. Chez elle, tout n’est que devoir, convenances, habitudes et soumission. Nous sommes à Cracovie à la fin du XIXe siècle, tout de même. Mais quand cette honorable bourgeoise croise l’odeur du sang et le parfum du crime, elle se métamorphose en […]

Les polars de Valerio Varesi sont toujours un cadeau. Un présent inestimable que l’on déguste page après page, à chaque fois séduit par l’élégance de son regard, surpris par la pertinence de ses remarques sur la vie qui coule et s’échappe, par son art de décrire du dedans les êtres et les choses. Et surtout, bien sûr, par son amour indéfectible pour la ville de Parme. Une cité dont il connaît les moindres recoins, dont il décrit en alchimiste les brumes et les fantômes humides et qu’avec magie il sait nous rendre infiniment désirable. Qui, en effet, ne brûle pas de découvrir Parme après avoir lu Varesi ?

Comme tous les grands amoureux, l’écrivain peut parfois se montrer jaloux, ou déçu. Et dans « La Stratégie du lézard » – son neuvième polar publié en français chez Agullo – il se met carrément en colère contre cette ville qui se laisse corrompre et séduire par les brigands et les mafieux de tous poils. Et, tout naturellement, cette rage, cette fureur, ce sont le commissaire Soneri, son héros recurrent, qui les endosse.

Bougonnant et fulminant – mais sauvé du désespoir par l’humour et la sagesse de sa compagne avocate Angela, Soneri s’immerge dans une nouvelle enquête qui voit des croquemorts se disputer le cadavre d’un vieil homme mort de froid dans une maison de santé, un maire vénal disparaître, un curé être passé à tabac. Sans oublier une meute de chiens transformés en mules par des trafiquants de cocaïne. Amis des animaux, vous voilà prévenus ! « La Stratégie du lézard » comporte quelques scènes qui vous feront frémir. Une fois les bêtes arrivées à bon port, en l’occurrence à Parme, elles sont sauvagement abattues pour récupérer la cocaïne dûment encapsulée dans leurs intestins.

Un téléphone dans la nuit

C’est en partant sur la trace d’un téléphone portable qui sonne tout seul dans la nuit hivernale et la neige que le commissaire Soneri tombe sur ce commerce odieux. En route, dans ce brouillard qui a le « pouvoir de remettre à zéro mémoire et expérience », il croise un curieux noctambule, un faussaire qui alimente en copies de tableaux illustres les notables de la ville. A la fois généreux et cynique, l’homme lui glisse quelques pistes pour mener à bien une enquête qui s’enlise. Et où le faux, à tous les niveaux, règne en maître dans ce monde où l’ennemi ressemble « au lézard, qui, pour tromper son prédateur, abandonne un morceau de queue ». Un casse-tête éthique et professionnel.

Mais Soneri ne désarme pas. Et quand il n’en peut plus, il se réfugie dans les bras d’Angela qui, philosophe, le rassure : « C’est une avocate qui te le dit. On peut être délinquant en toute légalité, pour ça, il suffit juste d’interpréter les normes. Regarde les banques. » Les deux amoureux se rendent ensuite au Milord, chez Alceste, pour déguster leurs chers tortelli, suivis d’un plat de tripes, le tout arrosé comme il se doit d’une bouteille de gutturnio. De quoi retrouver le goût du bonheur et croire à nouveau « à la beauté du monde ».

 

« La Stratégie du lézard ». De Valerio Varesi. Traduit de l’italien par Florence Rigollet. Agullo, 390 p.

 

Les polars de Valerio Varesi sont toujours un cadeau. Un présent inestimable que l’on déguste page après page, à chaque fois séduit par l’élégance de son regard, surpris par la pertinence de ses remarques sur la vie qui coule et s’échappe, par son art de décrire du dedans les êtres et les choses. Et surtout, […]

A force de psychologie et de sentiments, souvent horrifiques, tartinés au kilomètre, le polar contemporain a perdu de sa force et de sa pertinence. Il s’est coupé de ce qui faisait sa raison d’être et ses lettres de noblesse. Il reste heureusement des auteurs qui, à la cruauté morbide et au sordide gratuit, préfèrent le drame et tutoient la tragédie. Par leur savoir, la densité de leur propos et la qualité de leur écriture, ils font d’une ville, d’un pays et de son histoire, bref de la société et plus largement de la condition humaine, une source inépuisable d’inspiration et le cœur battant de leur propos.

L’Ecossais Liam McIlvanney fait partie de ces maîtres incontestés du roman noir. Professeur à l’Université d’Otago en Nouvelle-Zélande où il a inauguré la chaire des études écossaises, il officie également comme critique littéraire pour la London Review of Books. Il est par ailleurs le fils de l’écrivain William McIlvanney parfois surnommé « le parrain du Tartan noir ». Son nouveau roman, le quatrième publié en français chez Métailié, confirme sa singularité et son talent. « Retour de flamme » est un pavé, mais un pavé dont la complexité et la richesse méritent largement les quelque 600 pages que l’auteur leur consacre. Une remarquable immersion, à la fois hypnotique et incroyablement physique, dans le Glasgow des années 1970 gangréné par la guerre des gangs.

Un minotaure régnant sur le labyrinthe du crime

« Retour de flamme » est la suite de « Le Quaker », publié en 2019, mais peut parfaitement se lire indépendamment. Le récit se déroule entre le 22 juin et le 16 juillet 1975, soit sur un peu plus de trois semaines. Revenu de son exil londonien, l’inspecteur Duncan McCormack retrouve à Glasgow ses anciens collègues, et pas mal d’ennemis. Son job, désormais : coincer l’insaisissable Walter Maitland, véritable minotaure régnant sur un labyrinthe d’activités criminelles allant de la drogue à la prostitution en passant par la protection monnayée et les paris clandestins. Notre flic intrépide se voit toutefois rapidement freiné dans son élan par d’autres affaires apparemment plus urgentes – un incendie criminel, un homme torturé et assassiné retrouvé dans une décharge, l’explosion d’une voiture piégée – avant de découvrir qu’elles s’insèrent elles aussi parfaitement dans le puzzle complexe qu’il tente de reconstituer.

Et puis, bien sûr, il y a Glasgow, dont on découvre les différentes atmosphères et couleurs au gré des déplacements des personnages. Une séance de jogging avec McCormack nous offre « la meilleure vue sur la ville ». On contemple ensuite « le soleil parant d’argent la Clyde », on s’aventure dans l’autrefois sulfureux quartier des Gorbals avant de terminer le voyage en admirant « les belles maisons mitoyennes de Carlton Place, brillant de toute leur symétrie derrière le rideau intermittent des peupliers. Question gastronomie, l’auteur se révèle résolument lyrique quand il décrit « l’amertume sombre s’engouffrant à travers la crème blanche sucrée » d’une pinte de Guniness. Pour le reste, le lecteur se contentera de frites et de petits pains au bacon arrosé de sauce brune et visqueuse. On ne peut pas tout avoir !

 

« Retour de flamme ». De Liam McIlvanney. Traduit de l’anglais (Ecosse) par David Fauquemberg. Editions Métailié, 588 p.

 

A force de psychologie et de sentiments, souvent horrifiques, tartinés au kilomètre, le polar contemporain a perdu de sa force et de sa pertinence. Il s’est coupé de ce qui faisait sa raison d’être et ses lettres de noblesse. Il reste heureusement des auteurs qui, à la cruauté morbide et au sordide gratuit, préfèrent le […]

Les bisons sont un sujet délicat dans le Montana. Un peu comme les loups dans nos contrées. On les aime bien, on les respecte, on les admire, mais à condition qu’ils restent discrets. S’ils deviennent trop nombreux ou dangereux pour les troupeaux – ils peuvent apparemment transmettre la brucellose au bétail – ils sont abattus sans état d’âme par le gouvernement. Au grand dam de leurs défenseurs. Pour évoquer ce thème éminemment complexe, l’Américain Keith McCafferty a imaginé un polar lui aussi complexe. On y retrouve toute la fine équipe des romans précédents : la shérif Martha Ettinger, son adjoint indien Harold Little Feather et Sean Stranahan, peintre, pêcheur à la mouche, enquêteur occasionnel et ancien amoureux de Martha.

L’histoire démarre au lendemain de la fête du 4 juillet, dans la vallée de la rivière Madison, à deux pas des Palisades Cliffs. Un troupeau de bisons vient d’y trouver la mort : il semble s’être littéralement suicidé en se jetant dans le vide. A-t-il été effrayé par les feux d’artifice ? Des chasseurs les auraient-ils piégés et contraints à sauter ? Les rumeurs courent, les hypothèses fusent. On parle de buffalo jump (« précipice à bisons »), ou de pishkun, une ancienne pratique de chasse autochtone. Intrigués et perplexes, la shérif Martha et son adjoint se rendent sur place. Horrifiés, ils y découvrent le cadavre d’un jeune indien affreusement mutilé. Ce dernier avait été vu peu avant en compagnie de Blancs, des jumeaux poursuivis par une réputation douteuse. Bref, ça sent le roussi !

Mais comment y voir clair dans cet imbroglio ? Pour découvrir la pièce manquante du puzzle, les deux policiers vont avoir besoin de Sean Stranahan. Et ça tombe bien ! L’ancien privé vient de tomber sous le charme d’une sirène, une jeune femme qui nage dans l’aquarium géant du Trout Tails Bar et qui vient de l’engager pour retrouver un homme qu’elle a aimé. Or il s’avère que cet Indien a lui aussi participé au pishkun.

Après quelques leçons de pêche à la mouche, et un magnifique voyage au cœur de la nature sauvage, la vérité s’impose enfin. Tandis que l’amour, tel le phénix, semble toujours prêt à renaître de ses cendres. Parce que, comme l’énonce doctement Sean Stranaham, « le vrai amour ne recherche ni la logique ni la luxure, mais la synchronisation des battements des cœurs ».

 

« Buffalo Blues ». De Keith MacCafferty. Traduit de l’américain par Marc Boulet. Gallmeister, 486 p.

Les bisons sont un sujet délicat dans le Montana. Un peu comme les loups dans nos contrées. On les aime bien, on les respecte, on les admire, mais à condition qu’ils restent discrets. S’ils deviennent trop nombreux ou dangereux pour les troupeaux – ils peuvent apparemment transmettre la brucellose au bétail – ils sont abattus […]

Les romans de l’écrivain et journaliste d’investigation slovaque Arpád Soltész sont très noirs et passablement touffus. Comme la réalité qui l’entoure. Et « Colère », son dernier livre, l’est particulièrement. Normal, ce polar nous immerge une fois encore dans la fange mafieuse et les crimes malodorants de la Slovaquie des années 1990. Une époque où truands de tous poils, services de renseignement (le fameux SIS) et policiers marchaient main dans la main et se couvraient mutuellement. Désespérant pour quiconque rêve de justice, d’équité et de liberté.

Mais rassurez-vous, tous les personnages de Soltész ne sont pas pourris. Quelques-uns résistent, à leurs risques et périls. Exemple, le jeune lieutenant de police Igor Molnár, alias Molly, un idéaliste qui refuse d’admettre son impuissante face aux criminels et à la corruption qui gangrènent la ville de Košice, comme tout le reste du pays. « Il n’obéissait à aucune règle, sauf à la loi, précise l’auteur. Il ne respectait ni les ordres de ses supérieurs ni leurs arrangements. » Exaspérés par ses penchants donquichottesques, quelques criminels locaux vont rapidement le faire taire. Et maquiller le fait qu’ils l’ont eux-mêmes battu à mort en accident de voiture.

Une approche souple et créative de la loi

Mikulás Miko, dit Miki, le partenaire de travail de Molly, n’est pas dupe de cette improblable fiction. A 33 ans, ce vieux briscard de la lutte contre la criminalité est une légende vivante. Certes, lui-même traite la loi « d’une façon créative et flexible », et n’hésite pas à s’allier parfois avec quelques truands, mais il le fait « pour mettre les salopards au trou, pas pour les faire rester dehors », contrairement aux flics ripoux qui l’entourent. Désespéré de n’avoir pas su conserver Molly en vie, il décide de le venger. A ses côtés, le journaliste Pali Schlesinger, « une silhouette d’araignée qui aurait avalé un petit pois », fait preuve lui aussi d’une ténacité et d’un courage sans faille pour faire triompher la vérité et la justice. Leur combat sera rude.

Au fil des pages, grâce au talent d’enquêteur et d’écrivain d’Arpád Soltész, le lecteur prend une véritable leçon de criminologie. Après s’être initié aux règles de base du blanchiment d’argent, il apprend comment s’effectue le partage territorial entre les différents trafiquants de drogue qui opèrent sur le territoire slovaque, puis découvre les dessous juteux et illicites de la privatisation des entreprises. Seule consolation : « La vie d’un mafieux est belle, mais courte », comme le proclame lui-même un membre de la pègre de Košice. Quant à Arpád Soltész, comme le journaliste de son roman, il semble lui aussi « en avoir eu assez ». A 54 ans, après les élections législatives slovaques de 2023 qui ont été remportées par un allié de Viktor Orban, il a quitté son pays et vit désormais à Prague.

 

« Colère. Dans l’Est,  jadis ». D’Arpád Soltész. Traduit du slovaque par Barbora Faure. Agullo, 452  p.  

Les romans de l’écrivain et journaliste d’investigation slovaque Arpád Soltész sont très noirs et passablement touffus. Comme la réalité qui l’entoure. Et « Colère », son dernier livre, l’est particulièrement. Normal, ce polar nous immerge une fois encore dans la fange mafieuse et les crimes malodorants de la Slovaquie des années 1990. Une époque où truands de […]

Des tensions interreligieuses en Inde ? Des affrontements sanglants entre communautés indoues et musulmanes ? Voilà qui semble parfaitement d’actualité. « Les ombres de Bombay », cinquième polar de l’excellent Abir Mukherjee, s’ancre pourtant dans un passé déjà lointain. Son intrigue nous transporte au début des années 1920, dans une époque où l’Inde vivait encore sous domination britannique. Une période pleine d’effervescence et grosse de bouleversements à venir qu’il a choisie pour servir de cadre inspirant à une série de polars passionnants, pleins d’humour, d’ironie, et parfaitement documentés. Quand Abir Mukherjee décrit l’effervescence d’une gare surpeuplée, le parfum et la couleur d’une rue ou la colère dévastatrice des Bengalis lorsqu’ils perdent leur sang-froid, on peut lui faire confiance. Il parle, ou plutôt il écrit, en connaissance de cause.

Abir Mukherjee est né en 1974 à Londres dans une famille d’origine indienne. Il a grandi dans l’Ouest de l’Ecosse, étudié l’économie puis travaillé dans la finance avant de se lancer dans l’écriture. Son premier roman, « L’Attaque du Calcutta-Darjeeling » a reçu le Prix Le Point du polar européen 2020. On y faisait la connaissance d’un tandem d’enquêteurs de haut vol, relié par une grande estime réciproque et soudé par une amitié indéfectible : le capitaine Sam Wyndham, un Ecossais bon teint, ancien inspecteur de Scotland Yard, et le sergent indien Satyendra Banerjee, issu d’une bonne famille indienne de Calcutta.

De Calcutta à Bombay par la terre, l’eau et les airs

« Les ombres de Bombay » s’ouvre sur une catastrophe annoncée : l’assassinat, dans un quartier musulman de Calcutta, d’un célèbre homme de lettre hindou. Nous sommes en 1923, Gandhi est en prison, les tensions entre communautés religieuses sont à leur comble. Pour éviter que cet acte ne mette le feu aux poudres, Satyendra Barnejee essaie d’étouffer l’affaire et, ironie du sort, se voit lui-même accusé du meurtre. Risquant la peine de mort, il s’enfuit et tente de découvrir, seul, le véritable assassin. Informé entre temps de la catastrophe, Sam Wyndham va tout faire pour l’aider, mais il doit d’abord le retrouver.

Pour mieux traduire la tension extrême qui traverse le livre de part en part, l’auteur donne alternativement la parole à l’un et l’autre policier, jouant ainsi habilement avec la différence des points de vue et la façon de chacun de s’exprimer. Utilisant le train, le bateau, la voiture, puis l’avion, Bernerjee – rejoint par Wyndham – finit par atterrir à Bombay, d’où venait apparemment le commanditaire. Une ville « à bien des égards plus étrange que l’Angleterre » pour un Bengali. Sans argent, sans soutien officiel, la tâche du tandem s’annonce toutefois quasi désespérée. Deux dames de la bonne société, libres, riches et courageuses, vont leur être d’un précieux secours.

 

Abir Mukerjee fait partie des nombreux et prestigieux invités de la 20e édition du Festival Quais du polar qui se tient à Lyon du 5 au 7 avril 2024. http://www.quaisdupolar.com

 

« Les ombres de Bombay ». D’Abir Mukherjee. Traduit de l’anglais par Emmanuelle et Philippe Aronson. Editions Liana Levi, 368p.

Des tensions interreligieuses en Inde ? Des affrontements sanglants entre communautés indoues et musulmanes ? Voilà qui semble parfaitement d’actualité. « Les ombres de Bombay », cinquième polar de l’excellent Abir Mukherjee, s’ancre pourtant dans un passé déjà lointain. Son intrigue nous transporte au début des années 1920, dans une époque où l’Inde vivait encore sous domination britannique. Une […]

A propos de ce blog

Scènes et mises en scène: le roman policier, l’architecture et la ville, le théâtre. Passionnée de roman policier, Mireille Descombes est journaliste culturelle indépendante, critique d’art, d’architecture et de théâtre.

Photo: Lara Schütz

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