- janvier 13, 2025
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- Europe, Polars
Un petit bijou, ce polar! A la seule idée qu’on aurait pu le manquer, on en frémit rétrospectivement. Comme « Les jours de la peur » paru pour la première fois en français l’an dernier, « Passé, présent et après » de Loriano Macchiavelli se révèle un livre étonnant à tous points de vue. Et tout d’abord visuellement, avec son esthétique un brin désuète, sa couverture en carton à rabats et ses photographies toutes en trames et en grisailles qui encadrent le roman comme une fenêtre ouverte. Saluons à ce propos la philosophie des éditions du Chemin de fer qui, avec cet auteur étonnant, inaugurent leur nouvelle collection Train de nuit consacrée « à des romans noirs à haute valeur littéraire ».
Ce parti pris exigeant nous permet en effet de (re)découvrir avec émerveillement l’un des grands du polar italien, un auteur – aujourd’hui nonagénaire – qui envisageait le roman noir comme une façon d' »être contre » et comme un terrain propice à l’expérimentation. Macchiavelli, par exemple, n’a pas hésité à inclure dans ses récits un narrateur-auteur qui, parlant à la première personne et tapis dans l’ombre, partage avec nous ses doutes tout en commentant avec humour les décisions et les actions du personnage principal, créé en 1974, le sergent Sarti Antonio.
L’autre figure clé des romans de Macchiavelli, c’est Bologne, avec ses luttes politiques, ses beautés et ses laideurs. « Passé, présent et après » est même consacré à un quartier spécifique de la capitale de l’Emilie-Romagne, le Pilastro. « A l’époque, explique l’auteur dans la préface de cette nouvelle traduction destinée aux lecteurs francophones (le roman était déjà paru en 2008 chez Métailié sous un autre titre), le Pilastro était éparpillé dans les champs de la banlieue, c’était presque un bourg construit pour donner un toit aux extra-communautaires d’alors: les Italiens venus du sud. »
Une belle et surprenante rencontre
Le temps d’un roman, ce territoire interlope va devenir la seconde maison de Sarti Antonio. Sanctionné par sa hiérarchie pour avoir laissé dérober dans une exposition trois anciennes pièces de monnaie de grande valeur, il est en effet condamné à y patrouiller de nuit avec la voiture 28 en compagnie de son fidèle chauffeur et collègue Felice Cantoni. Parmi toute une galerie de personnages hauts en couleur croisés à l’occasion, il y fait une fort belle et surprenante rencontre, celle d’un enfant de 11 ans, Claudio, qu’il va tenter de protéger et qui, après bien des détours, lui permettra de démasquer son voleur.
Trônant au Panthéon des fins limiers du roman noir, Sarti Antonio reste un flic de polar atypique. Ni superman ni looser, grand buveur de café – mais qu’il trouve rarement à la hauteur du sien – il souffre de crises de colite qui l’obligent à interrompre à tout moment ses enquêtes pour rechercher des toilettes. Droit, foncièrement honnête, avec une conscience professionnelle et un courage à toute épreuve, il manque en revanche d’esprit de déduction et de synthèse. Pour faire le point sur une affaire, il recourt donc régulièrement à l’esprit acéré de son ami Rosas, un « anar de gauche », une tronche qui passe son temps à lire et étudier tout en sifflotant. Pour la bonne bouche, et sans déflorer la chute de « Passé, présent et après », on mentionnera la dernière scène du roman qui voit Sarti Antonio et Rosas, poursuivis par un homme armé, fuir à deux sur un vélo dont l’un et l’autre ignorent s’il a des freins. « La pente s’obstine à être des plus raides. Je ne peux plus rester derrière les deux zouaves et je les laisse filer », nous prévient le narrateur-auteur. Avant d’ajouter avec humour: « Il me déplairait fort de perdre le sergent Sarti Antonio d’une manière aussi triviale. »
« Passé, présent et après ». De Loriano Macchiavelli. Traduit de l’italien par Laurent Lombard. Les éditions du Chemin de fer, 288 p. En librairie le 15 janvier 2025.
A lire aussi:
« Les jours de la peur », la première enquête du sergent Sarti Antonio. De Loriano Macchiavelli. Traduit de l’italien par Laurent Lombard. Les éditions du Chemin de fer, 192 p.
Un petit bijou, ce polar! A la seule idée qu’on aurait pu le manquer, on en frémit rétrospectivement. Comme « Les jours de la peur » paru pour la première fois en français l’an dernier, « Passé, présent et après » de Loriano Macchiavelli se révèle un livre étonnant à tous points de vue. Et tout d’abord visuellement, avec […]
- janvier 6, 2025
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Dimanche 2 mai 1965. Le grand Louis Aragon se recueille au sommet de la Butte du Lion à Waterloo. Un pèlerinage en lien avec son projet de reprendre entièrement le texte de son roman « Les Communistes ». Alors que l’écrivain redescend pour rejoindre ses compagnons du Parti et les mondanités qui l’attendent à Bruxelles, il essuie un coup de feu qui le rate de peu. On l’exfiltre aussitôt. Ce prétendu attentat sert de point d’ancrage au nouveau roman de François Weerts, « On a tiré sur Aragon ». Un récit où se mêlent allégrement réalité et fiction.
Mécontents de la mollesse avec laquelle la police traite l’agression, le Parti communiste belge (PCB) mandate Viktor Rousseau, un détective privé grand lecteur de polars, pour découvrir qui en voulait à l’auteur de « Les yeux d’Elsa ». Et comme un boulot n’arrive jamais seul, Jean d’Arteveld, le secrétaire perpétuel de l’Académie belge, charge aussi notre limier de faire la lumière sur une deuxième affaire, qui concerne un ancien proche d’Aragon. En résumé, un homme de lettres bruxellois aurait retrouvé un manuscrit égaré de l’écrivain Paul Nizan et posséderait la preuve que ce dernier – qui venait de rompre avec le Parti communiste – aurait été abattu par un commando soviétique alors qu’il combattait sur le front. Un véritable assassinat couvert par Aragon pour des raisons idéologiques. Une affabulation rocambolesque? A Viktor Rousseau de le prouver, et ce ne sera pas facile.
On l’a compris! François Weerts, né en 1960 à Addis-Abeba, n’est pas un amateur de lignes droites, de résumés et de synthèses. Au risque de lasser son lecteur, ce journaliste établi à Waterloo l’emmène quasiment heure par heure à travers les innombrables méandres d’une enquête qui piétine, s’effiloche, se dédouble et n’évite pas les culs-de-sac. Et pourtant, on croche et on s’accroche car l’auteur parvient à merveille à saisir, dans toute leur ambiguïté, ces années 1960 encore hantées par le fantôme de la Seconde Guerre mondiale. Une époque où les plaies de la collaboration et les stigmates de l’épuration sont encore vivaces. Viktor Rousseau, le sympathique enquêteur de François Weerts, le découvrira à ses dépens. Avec amertume et tristesse.
« On a tiré sur Aragon ». De François Weerts. Rouergue noir, 448 p. En librairie le 8 janvier 2025.
Dimanche 2 mai 1965. Le grand Louis Aragon se recueille au sommet de la Butte du Lion à Waterloo. Un pèlerinage en lien avec son projet de reprendre entièrement le texte de son roman « Les Communistes ». Alors que l’écrivain redescend pour rejoindre ses compagnons du Parti et les mondanités qui l’attendent à Bruxelles, il essuie […]
- décembre 16, 2024
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Dans le polar, quand humour ne rime pas avec balourd, c’est déjà une prouesse. Et quand cette relative finesse se conjugue avec une imagination libre et bondissante que demander de plus sinon une certaine cohérence dans l’intrigue et des personnages évitant toute caricature. Scénariste de télévision et auteur de romans de fantasy plusieurs fois primés, après avoir été longtemps ghostwriter pour des people, des politiciens ou des écrivains connus, Gabriel Katz coche toutes les cases de cette réussite dans son amusante trilogie tournant autour de Noël et du Père Noël. Un moment de détente bien sympathique rythmé par des titres qui s’inspirent malicieusement de la très populaire chanson « Petit Papa Noël ».
Héros de ces aventures rocambolesques squattées par les pires mafieux de la planète, Benjamin Varenne est un beau gosse dont le sourire et les œillades font des ravages auprès des femmes. Enfin, pas forcément auprès de celles qu’il voudrait séduire. C’est par ailleurs un comédien – oui disons-le – raté qui vit de figuration et de petits boulots. Après avoir travaillé comme Père Noël dans un grand magasin, le voici proposant une dégustation de foie gras industriel à Monoprix puis vigile contrôlant les sacs à l’entrée de l’Opéra de Paris.
Rien de dangereux jusque-là sauf que Benjamin oublie tout, y compris son job et l’urgence de gagner sa vie, quand il s’agit de se porter au secours d’une belle en détresse. Qu’il s’agisse d’une danseuse harcelée par un mystérieux inconnu ou de la richissime concubine d’un trafiquant albanais jaloux, son geste chevaleresque se mue très vite en un cauchemar traversé par d’épiques courses-poursuites. Et quand la jeune femme bousculée par un malotrus s’avère une réalisatrice qui lui octroie le premier rôle de son film, c’est encore pire. Benjamin découvre que tout a été manipulé par son « copain » David, un agent de la DGSE lui aussi beau gosse et qui, « avec ses yeux bleus de husky et son sourire en coin », lui a déjà valu un Noël en Thaïlande et un autre à Venise, avant de l’envoyer geler en Roumanie, au cœur des Carpates, avec une mission des plus dangereuses et de plus délicates.
Alors, bien sûr, on ne fait pas d’omelette sans casser des œufs. Occis par lui, ou par d’autres, les cadavres des plus terribles gangsters jalonnent le parcours de Benjamin. Après avoir frôlé la mort, l’innocent comédien finit toutefois par toujours retrouver son job minable. En attendant le rôle de sa vie… dont il sait bien qu’il n’arrivera jamais.
« N’oublie pas mon petit soulier ». De Gabriel Katz. Editions du Masque, 310 p.
« Quand tu descendras du ciel ». De Gabriel Katz. Editions du Masque, 280 p.
« Dehors, tu vas avoir si froid ». De Gabriel Katz. Editions du Masque, 240 p. Prix du roman d’aventures 2024.
Dans le polar, quand humour ne rime pas avec balourd, c’est déjà une prouesse. Et quand cette relative finesse se conjugue avec une imagination libre et bondissante que demander de plus sinon une certaine cohérence dans l’intrigue et des personnages évitant toute caricature. Scénariste de télévision et auteur de romans de fantasy plusieurs fois primés, […]
- octobre 21, 2024
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Chez Davide Longo, lauréat du Prix Le Point du polar européen 2024 (https://polarspolisetcie.com/duo-de-polars-a-la-piemontaise/), les tueurs et les psys sont complètement givrés. Les autres personnages se situent plutôt dans la norme, y compris le commissaire Vincenzo Arcodipane qui soigne son stress et alimente ses maux d’estomac à coup de sucaï (des bonbons à la réglisse) achetés en vrac. Une dégustation compulsive qui, comme un leitmotiv obsédant, rythme l’intrigue d’ « Une colère simple », le troisième tome de la série des romans noirs piémontais.
Et dans ce nouveau polar, bien qu’un peu en retrait, on retrouve aussi le tragique et flamboyant Corso Bramard, le mentor d’Arcodipane. Ce policier brillant devenu enseignant à la suite de l’assassinat de sa femme et de sa fille souffre maintenant d’un méchant cancer. Sa maladie ne l’empêche pas toutefois de conserver l’esprit vif et le sens de l’amitié. A ce propos, n’oublions pas de mentionner la pétulante agente Isa Mancini, une as de l’informatique à l’appétit d’ogresse qui travaille désormais à la routière, mais n’hésite pas à donner un coup de main à ses anciens collègues.
« Une colère simple » commence en mineur. Avec une mystérieuse agression à Turin. Une jeune femme est rouée de coups sans raison à la sortie de la station de métro Principi d’Acaja. Elle est hospitalisée dans le coma. La scène a été filmée, l’agresseur portait un masque et un kimono. Un potentiel coupable est arrêté, il avait parié avec son amie de voyager ainsi accoutré, mais en dépit des apparences qui l’accablent, il n’est pas l’agresseur. Visiblement, l’auteur de cet acte barbare cherche à faire accuser quelqu’un d’autre à sa place.
Le récit – qui jusqu’ici louvoyait entre deux belles descriptions de Turin et les pittoresques mésaventures d’Arcodipane sur un site de rencontres – soudain s’accélère. Et trouve son rythme de croisière. Il est vrai que notre tenace et perspicace commissaire peut désormais compter sur un co-équipier supplémentaire, Luigi Normandia. Cet ancien policier passablement illuminé suit la même piste que lui. Et lui révèle l’existence de crimes similaires restés impunis. Plus soudée que jamais, la fine équipe finit par découvrir la cause d’une série de suicides et de morts suspects: un jeu mortifère et pervers enfoui au plus profond d’Internet. Pas de doute, le dark web a ces temps-ci la cote au royaume du bon polar! (https://polarspolisetcie.com/les-derives-criminelles-de-lintelligence-artificielle/).
« Une colère simple ». De Davide Longo. Traduit de l’italien par Marianne Faurobert. Editions du Masque, 350 p.
Chez Davide Longo, lauréat du Prix Le Point du polar européen 2024 (https://polarspolisetcie.com/duo-de-polars-a-la-piemontaise/), les tueurs et les psys sont complètement givrés. Les autres personnages se situent plutôt dans la norme, y compris le commissaire Vincenzo Arcodipane qui soigne son stress et alimente ses maux d’estomac à coup de sucaï (des bonbons à la réglisse) achetés […]
- octobre 8, 2024
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On attendait avec impatience la suite des rocambolesques aventures de la journaliste Julita Wójcicka et de son ami Jan, un as de l’informatique un brin autiste. La suite, la voilà et elle tient ses promesses. « Saturation totale », le troisième volet de la « Trilogie du dark net » du Polonais Jakub Szamałek ( https://polarspolisetcie.com/les-marionnettistes-de-lombre/ ), explore avec panache les nouveaux rebondissements d’une vaste affaire criminelle liée à l’usage dévoyé de l’intelligence artificielle. Autant dire que le lecteur devra faire fonctionner ses neurones. Mais qu’il se rassure ! L’écrivain, né en 1986 à Varsovie, se révèle un vulgarisateur hors pair en plus d’être un fin spécialiste en la matière. D’emblée, d’ailleurs, il nous prévient : « Au moment de confier ce texte à l’éditeur, il contenait encore d’infimes traces de science-fiction. Au moment de sa publication – ce n’était plus le cas. »
Comme dans les polars précédents, Jakub Szamałek court plusieurs lièvres à la fois. Ou du moins, dans un premier temps, nous en donne l’impression. Car derrière l’effondrement d’un immense réservoir contenant les eaux usées pompées par une mine de cuivre – des « liquides post-flottaison » hautement toxiques et cancérigènes – derrière la diffusion d’un étrange virus informatique qui laisse pantois les meilleurs spécialistes, derrière les alléchants contrats conclus avec des bibliothèques pour numériser leurs fonds, se cache un seul et même homme.
Un personnage machiavélique
Le cerveau diabolique de ces actions criminelles, « l’homme venu de nulle part », « le maître des manipulations en ligne » se nomme Daniel Królak. Aussi insaisissable que puissant, il tire sa force maléfique du génie longtemps méconnu de Pyotr Semenov, un brillant scientifique qui s’est formé dans l’ex-Union soviétique. Pionnier dans les recherches sur l’intelligence artificielle, ce dernier a longtemps vécu à Tomsk, en Sibérie, avant d’être exfiltré aux Etats-Unis.
Cela, Julita Wójcicka l’ignore encore en partie quand démarre « Saturation totale ». Grâce à son flair, à son opiniâtreté et à sa capacité à se glisser à travers les mailles toujours un peu lâches d’internet – un savoir qu’elle doit largement à son complice Jan – elle va remonter les traces infimes laissés par les deux prédateurs. Jusqu’en Suisse. Aussi courageuse qu’inconsciente, elle n’hésite pas alors à se jeter dans la gueule du loup pour faire éclater la vérité. Vous frissonnez ? Par bonheur, le dieu des honnêtes gens n’avait pas pris de cuite ce jour-là. Vous voilà rassurés !
Et pourtant…Et pourtant. Après avoir dévoré la « Trilogie du dark net », pas de doute, on ne contemple plus nos écrans du même œil. Et l’on hésite avant d’offrir nos données en pâture à n’importe qui. Dans un premier temps, en tout cas. Après, on oublie.
« Saturation totale. Trilogie du dark net 3 ». De Jakub Szamałek. Traduit du polonais par Kamil Barbarski. Editions Métailié, 394 p. En librairie le 11 octobre 2024.
On attendait avec impatience la suite des rocambolesques aventures de la journaliste Julita Wójcicka et de son ami Jan, un as de l’informatique un brin autiste. La suite, la voilà et elle tient ses promesses. « Saturation totale », le troisième volet de la « Trilogie du dark net » du Polonais Jakub Szamałek ( https://polarspolisetcie.com/les-marionnettistes-de-lombre/ ), explore avec panache les […]
- octobre 1, 2024
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- Europe, Polars
Humour et didactisme ne s’allient pas volontiers. Mais leur mariage est fructueux quand il est réussi. Paul Colize le prouve avec talent dans « Le meurtre de la rue Blanche » qui, comme son polar précédent « Devant Dieu et les hommes », nous emmène dans les coulisses de la justice belge, dans les méandres de son fonctionnement et de ses spécificités. Le récit se situe cette fois-ci un peu plus en amont, soit au moment de l’enquête et non du procès. Il a pour protagonistes un duo pittoresque et efficace formé par la juge d’instruction Emma Toussaint et son fidèle greffier Fabrice Colet, stature de bûcheron norvégien et sourire de présentateur télé. L’écrivain – né en 1953 à Bruxelles – nous précise dans la foulée qu’en plus d’interroger un inculpé, de convoquer des témoins ou d’ordonner des perquisitions, le juge d’instruction belge « a également le droit de délivrer un mandat d’arrêt, ce qui le rend plus redoutable que son alter ego français ».
Le problème, c’est qu’il manque une cinquantaine de juges et une bonne centaine de greffiers pour faire fonctionner la machine judiciaire correctement. Convoquée en urgence par le procureur du Roi dans un bureau qui ressemble « à un appartement- témoin pour adeptes de feng shui », Emma Toussaint doit tout abandonner pour se pencher sur une nouvelle affaire, particulièrement délicate. Tanguy Anselme, un célèbre avocat d’affaires, a été assassiné. Il est soupçonné d’appartenir à un réseau d’évasion fiscale et de blanchiment. Le meurtre remonte à un an déjà, une première équipe et un enquêteur privé s’y sont déjà cassé les dents. Un bel imbroglio en perspective !
Un innocent en prison
Et comme si cela ne suffisait pas, une affaire que l’on croyait classée se rappelle aux bons soins de notre infatigable duo. Alors que sa cheffe s’est absentée, Fabrice Colet – dont les habitudes alimentaires et les goûts vestimentaires donnent lieu à de savoureux paragraphes – réceptionne un appel téléphonique. Une voix anonyme prévient : « Le meurtre de la rue Blanche. Ce n’est pas ce que vous croyez. Elle [la juge Toussaint] a envoyé un innocent en prison. Dites-le-lui. ». Cette affaire, Fabrice s’en souvient comme si c’était hier. Il s’agissait de sa première scène de crime et de son premier cadavre. Une femme de 78 ans, Gisèle Verbiest avait été retrouvée morte à son domicile, tuée de trois coups de couteau. Les soupçons s’étaient immédiatement portés sur un des locataires de l’immeuble, « un junkie tatoué comme un guerrier maori ». A tort, apparemment.
La juge et son greffier vont ainsi devoir mener de fronts deux affaires très différentes qui, surprise, finissent par se télescoper. Quatre suspects incarcérés d’un coup ! Pratique ! De révélation fracassante en fausse piste, l’écrivain Paul Colize multiplie par ailleurs les occasions de nous faire rire ou sourire. La circulation bruxelloise en prend pour son grade. Le détective privé, à l’opposé de son double hollywoodien, a « la cinquantaine ventrue, le cheveu rare et le charme d’un ouvre-boîte ». Quant au snobisme vestimentaire d’un avocat parvenu, il évoque ni plus ni moins qu’« un tracteur agricole camouflé en Bentley ». On aime, ou pas. Mais cela fait drôlement du bien, d’autant que le suspense est nourri et l’intrigue bien construite.
« Le meurtre de la rue Blanche ». De Paul Colize. Editions Hervé Chopin, 314 p. En librairie le 3 octobre 2024.
Humour et didactisme ne s’allient pas volontiers. Mais leur mariage est fructueux quand il est réussi. Paul Colize le prouve avec talent dans « Le meurtre de la rue Blanche » qui, comme son polar précédent « Devant Dieu et les hommes », nous emmène dans les coulisses de la justice belge, dans les méandres de son fonctionnement et […]
A propos de ce blog
Scènes et mises en scène: le roman policier, l’architecture et la ville, le théâtre. Passionnée de roman policier, Mireille Descombes est journaliste culturelle indépendante, critique d’art, d’architecture et de théâtre.
Photo: Lara Schütz